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Dépression

Publié le 20 déc 2010Lecture 5 min

Comment stimuler en profondeur les déprimés ?

E. Neuman
La stimulation cérébrale profonde (SCP), traitement reconnu dans la maladie de Parkinson et d’autres pathologies du mouvement, est particulièrement adaptée lorsqu’une intervention sur un groupe de neurones au sein d’un réseau cérébral est susceptible de modifier une fonction ou un symptôme.
L’implantation stéréotaxique d’électrodes dans des structures cérébrales profondes impliquées dans la physiopathologie de maladies psychiatriques, connectées par un câble sous-cutané à un générateur électrique permet d’appliquer à la structure cible un courant à haute fréquence (80-150 Hz). L’effet de la stimulation est réversible, les différents paramètres de stimulation sont ajustés afin d’obtenir un résultat de qualité sans effet indésirable et sans morbidité, offrant l’espoir d’une amélioration de troubles sévères et résistants. De la modulation des cortex limbiques La SCP dans la dépression s’appuie sur des données de neuropathologie et d’imagerie fonctionnelle (Mayberg et coll., 2005), montrant un dysfonctionnement des boucles cortico-sous-corticales prenant naissance au niveau des cortex orbito-frontal, préfrontal dorso-latéral et cingulaire antérieur. En particulier, la partie ventrale subgénuale du cortex cingulaire antérieur (sgCCA) (Drevets et coll., 1997) semble le siège d’une hyperactivité dans l’état dépressif corrélée à la sévérité (Drevets, 2000) ou la résistance de l’épisode (Mayberg et coll., 2005). Le sgCCA serait impliqué, en lien avec le striatum ventral, dans les perturbations hédoniques et motivationnelles observées dans la dépression comme le confirment les études de provocation émotionnelle (induction d’une tristesse transitoire). Parallèlement, une corrélation est établie entre un hypofonctionnement des régions dorso-latérale et dorso-médiane du cortex préfrontal et la dégradation des fonctions cognitives, et une moindre activité au niveau de la région dorsale dite « cognitive » du CCA est décrite. Parmi ces régions, l’aire 24 occupe une position stratégique entre les structures limbiques et sous-corticales, d’un côté, et les structures corticales préfrontales, de l’autre. Une augmentation de l’activité de cette partie du cingulum antérieur avant traitement prédit une réponse sous traitement. La réinstauration d’une coopération équilibrée entre activité « corticale » et « limbique » semble constituer une voie finale commune pour une réponse favorable aux médicaments antidépresseurs et la rémission des symptômes dépressifs (Mayberg et coll.,1999 et 2005). Dans les dépressions réfractaires, cette coopération cortico-limbique reste perturbée et persiste une hyperactivité du système limbique (Mayberg et coll., 2005). Afin de moduler ces régions pour inverser cet état, la SCP de la substance blanche adjacente au genou du gyrus cingulaire a été utilisée chez 6 patients souffrant de dépression sévère résistante, y compris aux ECT, et a permis d’obtenir un état de rémission chez 4 sujets sur 6 (Mayberg et coll., 2005). De la modulation des régions limbiques sous-corticales Une autre cible thérapeutique pourrait être la partie ventrale du striatum, des observations ayant montré une efficacité de la stimulation de la région ventrale du striatum adjacente au bras antérieur de la capsule interne (Malone, APA 2006 ; Greenberg et coll., 2006), ou du noyau caudé pour des TOC sévères (Aouizerate et coll., 2004 et 2005). Le système des ganglions de la base et les émotions L’efficacité spectaculaire de la SCP sur les symptômes moteurs de la maladie de Parkinson est considérée comme résultant de la modulation de circuits neuronaux striato-pallido-subthalamo-thalamo-corticaux impliqués dans la motricité. La description de manifestations émotionnelles et comportementales (rire, symptômes dépressifs) (Bejjani et coll., 1999 ; Krack et coll., 2001) ou d’amélioration symptomatique (dépression, anxiété, TOC, jeu pathologique) (Houeto et coll., 2006 ; Mallet et coll., 2002 ;  Ardouin et coll., 2006) observées lors de la stimulation du NST suggère que la SCP module aussi la partie non motrice de ces mêmes circuits. Dans notre expérience, la SCP de la partie antéro-médiale du NST (en comparaison à la stimulation selon un plot adjacent, 2 mm en position plus dorsale) a induit l’apparition d’un état hypomaniaque, sans modification marquée sur le plan moteur. Les données obtenues en TEP ont notamment montré une augmentation du débit sanguin cérébral dans le noyau ventral antérieur (partie limbique) du thalamus et une diminution dans le gyrus cingulaire préfrontal médial antérieur droit, en accord avec les données existant dans ces troubles de l’humeur (Blumberg et coll., 2000) qui suggèrent que le NST chez l’homme comprend une partie associativo- limbique. La cible idéale ? En conclusion, si des modifications émotionnelles semblent pouvoir être déclenchées par la modulation des voies de sortie des ganglions de la base, il existe peu de données pour penser que les parties limbiques de ces voies représentent une cible idéale pour « inverser » des symptômes dépressifs, dont au premier rang une humeur dépressive.  Au vue des données actuelles, peut-on tout juste formuler l’hypothèse, hautement spéculative, que la modulation de zones ventrales et limbiques, comme la partie antéro-ventrale du NST ou la SNr pourrait représenter un levier puissant pour potentialiser un effet initié à l’étage striatal ou cortical. 

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