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Accident vasculaire cérébral

Publié le 21 déc 2010Lecture 8 min

Facteur VII activé dans les hémorragies cérébrales : espoirs et réalité

K. VAHEDI, Service de Neurologie, Hôpital Lariboisière, Paris
Le pronostic des hémorragies cérébrales est catastrophique, ce qui justifie la recherche de nouvelles stratégies thérapeutiques pour tenter de limiter les séquelles et la mortalité. Parmi ces nouvelles approches, l’utilisation d’agents hémostatiques, destinés à contrôler le resaignement précoce, paraît séduisante. Toutefois, les résultats des premiers essais menés avec le facteur VII activé semblent, comme nous allons le voir, quelque peu contradictoires.
Les hémorragies cérébrales sont la forme la plus grave d’accidents vasculaires cérébraux avec 35 à 50 % de mortalité avant le 30e jour et seulement 1/5 patients non dépendants à 6 mois. Aucun traitement spécifique n’a démontré son efficacité, et même l’évacuation chirurgicale de l’hématome n’apporte pas un bénéfice prouvé dans la majorité des cas. Seule la prise en charge du patient dans une unité neurovasculaire permet d’améliorer le pronostic catastrophique de cette pathologie pour laquelle de nouvelles stratégies thérapeutiques sont en cours d’évaluation, parmi lesquelles l’utilisation des agents hémostatiques. Le principe est basé sur le rôle déterminant du resaignement précoce dans les 3 heures du début de l’hémorragie cérébrale. Ce saignement actif au cours des premières heures survient dans la majorité des cas et a été corrélé à la mortalité dans les 30 jours. Seule la prise en charge du patient dans une unité neurovasculaire permet d’améliorer le pronostic. Parmi les agents hémostatiques, le facteur VII activé recombinant (rFVIIa), utilisé dans le traitement des saignements chez le patient hémophile, a une action puissante et rapide en générant le facteur X activé et la formation du caillot de fibrines, et pourrait également être intéressant dans le traitement des hémorragies non contrôlables chez le patient non hémophile. Un effet sur la progression du volume de l’hématome Dans l’hémorragie cérébrale, le rFVIIa a d’abord été testé dans des études pilotes, puis dans un essai de phase IIa, montrant son bénéfice pour réduire l’expansion précoce de l’hématome1. En effet comparativement au placebo, les doses de 40 à 160 μg/kg administrées dans les 4 heures de l’hémorragie cérébrale permettaient une diminution relative, dose-dépendante, de 40 à 50 % de la progression du volume de l’hématome (progression de 8,7 ml dans le groupe placebo versus 4,2 ml dans les groupes traités pour un volume hémorragique de base de 24 ml en moyenne). Cette différence restait significative si le volume de l’hémorragie intraventriculaire et/ou de l’oedème autour de l’hématome étaient également considérés dans le total du volume lésionnel. Et de façon parallèle, il était noté une amélioration significative du devenir des patients de l’ensemble des trois groupes traités réunis (303 patients) par rapport au groupe placebo seul (96 patients) pour ce qui concerne la mortalité (réduction du risque relatif de 38 %) ou la mortalité et le handicap résiduel sévère (Rankin 5) associé (réduction de risque absolu de 16 % [5-27]). Dans cet essai, la tolérance du rFVIIa a été jugée satisfaisante malgré une augmentation non significative de 5 % des événements indésirables thromboemboliques, principalement de type artériel cérébral ou coronarien. De manière intéressante, l’effet du rFVIIa était plus évident lorsque le produit était administré dans les 3 heures du début des signes cliniques, alors qu’une analyse en sous-groupe ne montrait aucun effet du traitement entre 3 et 4 heures. Des résultats moins encourageants avec FAST Tous ces résultats étaient néanmoins très encourageants et ont mené à la réalisation d’un grand essai international de phase III (étude FAST), avec l’objectif d’évaluer l’intérêt du traitement hémostatique ultraprécoce par rFVIIa pour limiter l’expansion de l’hémorragie cérébrale, diminuer la mortalité et améliorer le devenir fonctionnel des patients2. Cet essai a été mené de 2005 à 2007 dans 22 pays, et 122 centres y ont participé. Une dose faible (20 μg/kg) et une dose moyenne (80 μg/kg) de rFVIIa ont été testées contre placebo. Le produit était administré en bolus intraveineux dans les 4 heures au plus tard du début des signes cliniques d’une hémorragie cérébrale. Un total de 841 patients, dont l’âge moyen était de 65 ans, a été randomisé dans les trois groupes. La majorité était des hommes (62 %), caucasiens (69 %), avait une cardiopathie hypertensive (30 % environ) et un hématome de siège profond dans les noyaux gris centraux (78 %) ; 73 % des patients ont reçu le bolus moins de 3 heures après le début des signes cliniques. L’effet radiologique du rFVIIa sur l’expansion de l’hématome a été bien reproduit dans ce nouvel essai, mais uniquement avec la dose de 80 μg/kg et uniquement sur le volume de l’hématome intraparenchymateux, avec une différence de 3,8 ml de moins de resaignement par rapport au placebo pour un volume initial moyen de l’hématome de 23 ml environ. Par contre, l’effet sur l’expansion de l’hémorragie intraventriculaire, ou le volume total de la lésion comprenant l’oedème péri-hémorragique, n’était plus significatif. Ce faible effet sur le resaignement intraparenchymateux n’était de plus pas accompagné d’effet clinique. Aucun des critères d’évaluation clinique (score de Rankin, NIHSS, index de Barthel) ne différait entre les groupes traités et le groupe placebo. Environ 20 % des patients étaient décédés à 3 mois, quel que soit le groupe thérapeutique. Les événements indésirables liés à l’effet prothrombotique du rFVIIa étaient significativement augmentés pour le risque thrombo-embolique artériel (élévation de la troponine, modification du segment ST, infarctus cérébral). L’âge élevé et la prise d’antiplaquettaires étaient les facteurs associés à la survenue de ces événements indésirables thromboemboliques. L’effet sur l’expansion de l’hémorragie intraventriculaire ou le volume total de la lésion n’était plus significatif. L’étude FAST n’a pas reproduit les mêmes résultats que l’essai de phase IIa du rFVIIa dans l’hémorragie cérébrale. Une des explications pourrait être dans la différence constatée entre les bras « placebo » des deux études en termes de devenir clinique (mortalité, Rankin) expliquant les différences de comparaison avec les groupes traités. Ceci souligne l’importance des grandes études internationales incluant un effectif suffisamment large de patients. Mieux cibler les patients susceptibles de bénéficier de l’effet hémostatique du rFVIIa. Un bénéfice pour un sous-groupe de patients Faut-il, au vu des résultats de l’étude FAST, abandonner totalement l’idée d’un effet potentiellement favorable du rFVIIa dans l’hémorragie cérébrale ? Peut-être pas car une analyse post hoc de FAST a montré un possible effet favorable du rFVIIa si le patient appartenait à un sous-groupe d’âge < 70 ans, avec un volume initial de l’hématome < 60 ml, peu ou pas d’hémorragie intraventriculaire associée et un début du traitement par rFVIIa dans les 2 heures 30 du début des symptômes. Pour vérifier cette hypothèse, il faudra cependant réaliser un nouvel essai randomisé sur probablement un très grand nombre de patients. Une autre stratégie serait de mieux cibler les patients susceptibles de bénéficier de l’effet hémostatique du rFVIIa du fait d’un plus haut risque de saignement actif. Il a récemment été montré que la présence sur l’angio-scanner cérébral de « spot sign » (point d’extravasation de produit de contraste au sein de l’hématome) était très prédictif de resaignement cérébral précoce. Les autres variables radiologiques associées au risque de resaignement et donc de mauvais pronostic sont la présence d’une extension intraventriculaire, un effet de masse ou une hydrocéphalie. De plus, le volume initial de l’hématome, sa forme régulière ou irrégulière et sa densité homogène ou hétérogène au scanner pourraient également être des éléments déterminant d’expansion de l’hématome3. En attendant un nouvel essai thérapeutique évaluant l’intérêt des hémostatiques sur des populations plus ciblées de patients atteints d’hémorragie cérébrale, la meilleure stratégie reste à ce jour l’effet majeur des antihypertenseurs en prévention primaire et secondaire.

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