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Alzheimer et Démences

Publié le 19 déc 2010Lecture 23 min

Alzheimer : de la physiopathologie à la médecine nucléaire

Philippe TELLIER*, Jean-Emmanuel FILMONT, Pascal LECOUFFE, Patrick LE COZ, *Centre de Médecine Nucléaire de l’Artois, Clinique Sainte-Catherine, Arras
La maladie d’Alzheimer, qui rentre dans le cadre plus vaste des démences type Alzheimer (DTA), constitue la principale cause des démences, notamment chez le sujet de plus de 65 ans. Les progrès accomplis dans la connaissance des DTA ont permis de mieux appréhender leurs manifestations neurologiques les plus précoces et même d’évoquer la maladie quand elle est encore asymptomatique ou très peu symptomatique. Quelle est alors la place de la médecine nucléaire dans ce diagnostic précoce ? 
Le diagnostic de DTA repose d’abord sur des critères cliniques standardisés et validés, mais il est des formes difficiles, débutantes ou trompeuses qui mettent en échec cette approche (2). Le diagnostic différentiel entre les diverses formes de démence est volontiers laborieux, au point que la seule analyse clinique est rarement suffisante en pratique courante. Le Déficit cognitif léger (DCL) pourrait être, dans certains cas, le précurseur de la DTA, mais cette hypothèse mérite d’être un peu plus étayée et rien ne prouve actuellement qu’une intervention thérapeutique précoce dans les formes à haut risque puisse influer sur le pronostic neurologique à long terme. S’il n’existe aucun traitement curatif de la DTA, il est désormais admis qu’il faut recourir le plus précocement possible aux inhibiteurs de la cholinestérase et/ou aux antagonistes des récepteurs NMDA (N-méthyl-D-aspartate), sans omettre la prise en charge des comorbidités (2). Une telle stratégie suppose que le diagnostic étiologique des démences soit le plus précis possible. Que peut apporter la médecine nucléaire dans le diagnostic positif des DTA ? Au travers des techniques d’imagerie fonctionnelle dont elle est par excellence la dépositaire, la médecine nucléaire peut permettre un éclairage décisif sur certaines situations cliniques complexes ou embrouillées. Certes, les techniques tomoscintigraphiques, qu’elles relèvent de la Tomoscintigraphie d’émission monophotonique (TEMP) ou de la Tomographie à émission de positons (TEP) peuvent être accusées d’un manque de spécificité. De fait, elles ne mettent pas directement en évidence les désordres neuropathologiques caractéristiques de la maladie d’Alzheimer dont le diagnostic, en toute rigueur, devrait être anatomopathologique (2). La tomoscintigraphie cérébrale, TEMP ou TEP, visualise le retentissement du processus neurodégénératif sur le métabolisme neuronal, directement ou indirectement, selon le radiotraceur utilisé. Les traceurs technétiés utilisés pour la TEMP donnent accès à la perfusion cérébrale qui est étroitement couplée au métabolisme cérébral à l’échelon régional. Le FDG ou 18F- fluorodéoxyglucose, analogue du glucose destiné à la TEP, permet, pour sa part, d’évaluer directement le métabolisme cérébral.   La tomoscintigraphie cérébrale, TEMP ou TEP, visualise le retentissement du processus neurodégénératif sur le métabolisme neuronal.   La combinaison des informations fournies par les examens morphologiques (IRM, tomodensitométrie) et fonctionnels (TEP, TEMP) permet en règle de conclure en sachant que la TEP, pour l’instant, en France, n’a pas d’indication dans le diagnostic des affections neurodégénératives à la différence de pays comme les États-Unis. À cet égard, il faut souligner avec force que le diagnostic de DTA n’est pas fait par élimination des autres étiologies potentielles : c’est bel et bien un diagnostic d’inclusion qui doit être fait avec le maximum de certitude ou le minimum d’incertitude, compte tenu de ses conséquences psychologiques pour le malade et sa famille. L’avenir pourrait venir de la visualisation directe des plaques amyloïdes au moyen de radiotraceurs marqués par les émetteurs de positons ou les émetteurs monophotoniques (iode 123, voire technétium 99m). Quoiqu’il en soit, le potentiel de l’imagerie nucléaire fonctionnelle est dans le cas des démences considérable, mais il ne s’exprimera pleinement qu’avec le développement de la TEP en pratique courante, ce qui peut aller vite, compte tenu des besoins diagnostiques et des progrès thérapeutiques. DTA : une pathogénie encore discutée Les DTA ont une traduction clinique bien connue. Elle associe des troubles mnésiques précoces et une détérioration progressive des fonctions cognitives qui finit par compromettre la réalisation des activités de la vie courante et aboutir à la perte de l’autonomie. Le pronostic vital est mis en jeu plus ou moins rapidement et les DTA sont, d’ailleurs, la quatrième cause de décès par maladie dans un pays comme les États-Unis. En 2000, 4,5 millions d’Américains étaient touchés par cette maladie, mais tout prête à penser qu’en 2050, sous l’effet du vieillissement de la population, ce sont plus de 13 millions d’Américains qui seront concernés. En 2004, plus de 800 000 Français en étaient atteints et la même évolution à la hausse qu’aux États-Unis devrait s’observer. La prévalence de ces démences, qui est d’environ 5 % entre 65 et 74 ans, augmente de manière exponentielle à partir de 65 ans et atteindrait plus de 30 % après 85 ans. Il faut ici rappeler que malgré cette véritable épidémie, le diagnostic de DTA n’est pas posé chez un patient sur 2.   Le diagnostic de DTA n’est pas posé chez un patient sur 2.   S’il existe un consensus sur les définitions cliniques et neuropathologiques des DTA, force est de reconnaître que leur étiologie et leur pathogénie sont loin d’être connues avec exactitude. Les mécanismes sous-jacents sont à la fois complexes et multiples, et tributaires de la génétique et de l’environnement. Les formes pures des DTA qui surviennent indépendamment de toute autre pathologie neurologique ne sont rencontrées que dans 50 à 60 % des cas autopsiés. Le chiffre atteint 80 % quand d’autres lésions anatomopathologiques coexistent. Les démences vasculaires (Dva), les démences à corps de Lewy (DCLew), les démences frontotemporales (DFT) et les autres formes rendent compte des 20 % restants. La maladie cérébrovasculaire (MCV) est la seconde cause de déficit cognitif acquis et de démence. Elle contribue, d’ailleurs, au déclin cognitif dans les démences neurodégénératives et de nombreuses formes sont situées à l’intersection de la Dva, de la DCLew et de la DFT, ce qui n’est pas sans compliquer l’étape diagnostique. Sur le plan neuropathologique, la DTA se caractérise par les lésions suivantes :   Plaques amyloïdes ;   Dépôts neurofibrillaires composés de protéine tau phosphorylée ;   Dégénérescence neuronale ;   Perte synaptique étroitement corrélée au déclin cognitif.   La découverte de mutations, situées sur des gènes du chromosome 21 codant pour le précurseur de la substance amyloïde et conduisant aux rares formes familiales précoces de la maladie, a alimenté l’hypothèse de « la cascade amyloïde ». La sécrétion d’une substance amyloïde a priori toxique (Ab42) conduirait à la formation de fibrilles amyloïdes insolubles qui sont le constituant majeur des plaques séniles, mais cette hypothèse ne fait pas l’unanimité et, pour certains, ce sont les dépôts neurofibrillaires de protéine tau qui seraient la lésion inaugurale. La toxicité in vivo de la substance Ab42 n’est pas démontrée et d’autres molécules pourraient jouer un rôle plus délétère. D’autres mutations sur les gènes des présénilines 1 et 2 ont été incriminées. Les formes sporadiques (plus de 90 % des DTA) sont multifactorielles même si le risque attribuable à des déterminants génétiques (notamment l’allèle E4 de l’apolipoprotéine E). Du déclin cognitif léger à la démence type Alzheimer Le diagnostic de la DTA est certes clinique et, dans les cas typiques, il est relativement aisé, mais comme à l’ordinaire les formes trompeuses sont légion et c’est là qu’intervient la neuro-imagerie, dont la médecine nucléaire au travers de la TEMP et de la TEP.  À l’instar de bien d’autres affections, la maladie débute au niveau moléculaire et sa seule expression se confine longtemps à des désordres infracliniques, d’autant que l’évolution est typiquement lente. L’accumulation des plaques amyloïdes qui conduit à une véritable amyloïdose précède de longue date les premières manifestations cliniques. Les médicaments susceptibles d’infléchir résolument son histoire naturelle devraient logiquement être prescrits dès les premiers stades, mais ils restent encore à découvrir. C’est là que l’imagerie fonctionnelle devrait être la plus contributive, car des techniques comme la TEP et la TEMP permettent à la fois une évaluation objective de la maladie à son stade préclinique et son suivi non invasif qui donne une idée du caractère plus ou moins évolutif du processus neurodégénératif. Cette information, pour l’instant, n’a pas d’impact majeur en pratique clinique courante, mais elle est à l’évidence capitale dans les essais thérapeutiques visant à évaluer les médicaments capables de prévenir l’aggravation de la DTA. Il faut souligner à cet égard que la prévalence de la MCV dans ce contexte est élevée et que les examens morphologiques (IRM, tomodensitométrie) peuvent faciliter son identification, notamment chez le sujet âgé qui a une forte propension à développer des infarctus cérébraux silencieux. La fréquence de ces deniers est, par ailleurs, corrélée à l’augmentation de l’incidence des démences dans la population âgée. Les formes légères ou modérées de la DTA sont d’ores et déjà susceptibles d’être traitées par des médicaments qui ont fait la preuve d’une certaine efficacité symptomatique, obtenue au prix d’une tolérance clinique et biologique qui n’est pas toujours excellente. Il est évident que le recours à ces thérapeutiques suppose qu’un diagnostic positif soit établi avec la plus grande précision possible, ce à quoi les données cliniques ne peuvent à elles seules prétendre. Certaines études suggèrent, par ailleurs, que les inhibiteurs de la cholinestérase sont à même de ralentir ou de retarder le déclin cognitif de 6 à 12 mois, et même de reculer le moment du placement en institution de 18 mois en moyenne, ce qui justifie encore plus le recours aux examens complémentaires les plus contributifs, et la neuro-imagerie fonctionnelle est ici bien placée pour répondre à ce besoin (2,3).   Certaines études suggèrent que les inhibiteurs de la cholinestérase sont à même de ralentir le déclin cognitif de 6 à 12 mois.   Le DCL, pour sa part, semble bien être le précurseur de la DTA, tout au moins chez certains malades et dans une proportion qui reste à préciser d’un point de vue épidémiologique. Le DCL a été défini initialement par Petersen comme l’association de troubles mnésiques « légers » estimés en fonction de l’âge, l’absence de désordres fonctionnels majeurs et de signes de démence. Ce concept a été élargi en distinguant 3 sous-types : amnésique, altération légère de domaines cognitifs multiples, altération isolée d’un domaine cognitif autre que la mémoire. Ce diagnostic est loin d’être aisé et il est souvent difficile de distinguer un DCL du déclin cognitif « physiologique  » lié à l’âge, au demeurant hautement variable d’un sujet à l’autre. Il permet néanmoins de combler la solution de continuité entre le normal et la démence. Chaque année, 12 % des DCL, essentiellement les DCL amnésiques, évolueraient vers une authentique DTA. La TEMP et la TEP semblent utiles pour repérer ces formes de DCL de mauvais pronostic. Des essais thérapeutiques sont actuellement en cours pour évaluer les médicaments susceptibles d’enrayer cette évolution péjorative. Les variables les plus prédictives d’un point de vue pronostique sont certes cliniques, au travers des performances accomplies dans la réalisation des activités quotidiennes, de l’aptitude à résoudre les problèmes complexes,  mais aussi d’une éventuelle dépression. Elles sont aussi paracliniques avec, par exemple, l’existence d’une atrophie hippocampique détectée par l’IRM ou d’anomalies tomoscintigraphiques patentes accessibles à la TEMP ou à la TEP. L’hypothèse d’un DCL à risque doit conduire à la mise en œuvre de toute une série de mesures préventives visant à ralentir la progression du processus pathologique, à la fois non pharmacologiques et pharmacologiques (dans la mesure des possibilités actuelles). L’entretien des performances mentales et physiques, le maintien de l’engagement social, la réduction du stress, l’hygiène alimentaire, l’administration d’anti-oxydants (vitamines C et E) sont autant de mesures classiquement préconisées, sans oublier la correction énergique des facteurs de risque cardiovasculaire qui ne peuvent qu’aggraver le déclin cognitif et favoriser la progression vers une démence mixte, combinant processus neurodégénératif et lésions vasculaires. Quels radiotraceurs pour le diagnostic de DTA ? Une exploration scintigraphique ne se conçoit pas sans le recours à des radiotraceurs adaptés qui ne sont pas légion à l’heure actuelle1. D’un point de vue biologique, il faut rappeler qu’au niveau du cerveau, la consommation régionale de glucose et d’oxygène est finement régulée en fonction de l’activité neuronale. Le couplage entre le débit sanguin (« perfusion ») et le métabolisme à un échelon cellulaire se manifeste aussi bien en physiologie qu’en pathologie, et c’est ce mécanisme régulateur fondamental qui est exploité en TEMP et en TEP pour détecter les perturbations de l’activité neuronale caractéristiques des processus neurodégénératifs. La TEMP, un examen accessible En TEMP, les radiotraceurs de perfusion couramment utilisés sont au nombre de deux :   HMPAO (Hexaméthylepropylène amine oxyne) ou Ceretec® ou sa version stabilisée Cerestab® (Amersham GE Healthcare) ;   ECD (Éthylène cystéine dimère) ou Neurolite® (Bristol Myers Squibb). Une fois injectées par voie intraveineuse, ces deux molécules lipophiles traversent la barrière hémato-encéphalique et entrent dans les neurones proportionnellement au débit sanguin régional : c’est en ce sens qu’il s’agit de traceurs de perfusion (+/- métabolisme) qui vont séjourner ensuite dans ces cellules pendant de longues heures, du fait de leur conversion en molécules hydrophiles selon deux mécanismes différents1 : - ECD : réaction enzymatique de D-estérification ; - HMPAO : instabilité moléculaire conduisant à un comportement hydrophile. Les variations du débit sanguin cérébral régional, qui surviennent dans les minutes qui suivent l’injection, n’influent pas sur la distribution intracérébrale du radiotraceur, quel qu’il soit. Sur le plan biologique, la captation cellulaire de l’ECD est plutôt de type métabolique, alors que pour le HMPAO, c’est la perfusion cérébrale au moment de l’arrivée de l’embole qui l’emporte in fine. En pratique, cependant, les différences entre les images tomoscintigraphiques obtenues sont plutôt subtiles (fixation plus marquée de l’ECD au niveau occipital et pariétal). De plus, les caractéristiques pharmacocinétiques des radiotraceurs influent sur les protocoles d’acquisition (tableau). Pour ces deux vecteurs chimiques, c’est le technétium 99m qui sert de marqueur radioactif (période physique : 6,02 h ; spectre énergétique : émetteur gamma pur de 140 keV), au point que ces radiopharmaceutiques sont considérés comme des dérivés dit technétiés. L’avantage de cette technique tient à ce qu’elle est largement diffusée, puisqu’il suffit de disposer d’une gamma-caméra tomographique standard pour réaliser l’exploration, au point qu’elle est entrée dans la routine dans de nombreux centres qui pratiquent la neurologie nucléaire. La résolution spatiale peut paraître médiocre (de l’ordre du centimètre), mais en pratique, les performances actuelles des systèmes de détection et des logiciels de reconstruction des images permettent de véritables prouesses diagnostiques (entre les mains des opérateurs les plus performants, cela s’entend).   La TEP, une diffusion encore limitée En TEP, le radiotraceur utilisé est le FDG (18F-Fluorodéoxyglucose), analogue du glucose. La captation cellulaire est proportionnelle à l’activité métabolique des neurones qui ont pour substrat énergétique principal le glucose. C’est donc le métabolisme régional de ce dernier qui est directement évalué (encore faut-il que la perfusion cérébrale soit suffisante pour assurer son arrivée dans chaque région du cerveau). Les images obtenues sont d’une qualité supérieure à celles de la TEMP, avec une résolution spatiale de l’ordre de 3 à 4 mm, voire meilleure avec certaines caméras à positons. En contrepartie, il y a quelques ombres au tableau :   absence d’indication actuelle en neurologie nucléaire, mais la situation va évoluer au fur et à mesure de l’implantation d’un nombre croissant de caméras à positons à l’échelon national, d’autant que dans d’autres pays, le diagnostic étiologique des démences est d’ores et déjà du ressort de la TEP ;   faible diffusion de la technique qui reste confinée à quelques centres spécialisés ;   coût élevé de l’examen : de l’ordre de 1 000 euros (versus 300 euros pour la TEMP). En pratique courante, que peut apporter la TEMP au diagnostic positif et différentiel de la DTA ? La TEMP facilement réalisable au moyen des radiotraceurs technétiés, précédemment évoqués, peut contribuer au diagnostic positif d’une DTA et au diagnostic étiologique d’une démence, en sachant que, comme toujours, c’est sur un faisceau d’arguments que le diagnostic le plus probable doit être évoqué2,3,6. À l’heure actuelle, aucun tableau scintigraphique considéré isolément n’est à l’évidence pathognomonique de la DTA. La combinaison de l’imagerie morphologique et fonctionelle, en tenant bien sûr compte du contexte clinique, est la seule démarche défendable et pragmatique capable de répondre à la problématique. Mais il faut toujours se souvenir que le diagnostic de DTA ou de DCL à haut risque est une véritable épée de Damoclès au-dessus de la tête du patient et, qu’à ce titre, il convient de ne la brandir qu’opportunément, avec toutes les précautions qui s’imposent2. L’imagerie fonctionnelle nucléaire permet de détecter des anomalies significatives de la perfusion ou du métabolisme cérébral, bien avant que l’imagerie morphologique ne révèle des anomalies structurales dont la spécificité est certes plus élevée, mais au prix d’une sensibilité nettement moindre3,6. La clinique est encore plus limitée dans le diagnostic précoce de la DTA. Il est clair que les techniques scintigraphiques sont plus électivement utilisées dans les formes légères ou modérées de la maladie, car à la phase d’état, le diagnostic est plus aisé et l’agitation psychomotrice peut rendre l’examen impossible (la coopération totale du malade est en effet indispensable pendant en moyenne 20 à 30 minutes). De plus, les têtes de la gamma-caméra frôlent la tête du malade et il est évident que les patients les plus angoissés ne peuvent se soumettre à un tel protocole. Quels sont les aspects évocateurs ? Par rapport aux images normales obtenues en TEMP (figures 1 et 2) ou en TEP (figure 3), les aspects les plus évocateurs de la DTA notamment débutante, légère ou modérée (figure 4) même s’ils n’en sont pas spécifiques sont les suivants :   hypofixation préférentielle des aires temporales ou temporo-pariétales (figure 5) ;   hypofixation du cortex cingulaire postérieur ;   fixation moins altérée, voire normale, au niveau du cortex sensorimoteur primaire et visuel ;   absence d’altération au niveau du thalamus, du striatum et du cervelet ;   aux stades les plus précoces, les anomalies sont volontiers asymétriques.       Figure 1. Tomoscintigraphie cérébrale de perfusion normale. Coupes transverses. Traceur : ECD marqué par le technétium 99m (99m Tc-ECD).       Figure 2. Tomoscintigraphie cérébrale de perfusion normale. Coupes transverses, sagittales et frontales. Traceur : 99m Tc-ECD.     Figure 3. Tomoscintigraphie cérébrale normale. Coupes transverses. Traceur : FDG marqué par le fluor 18, émetteur de positons. C’est la partie interne du lobe temporal qui est la plus précocement touchée par les troubles métaboliques et les désordres histopathologiques caractéristiques de la DTA. Les autres démences ont une sémiologique scintigraphique plus ou moins différente :   Dva : hypofixation diffuse mutifocale  des aires corticales, sous-corticales et cérébelleuses (figure 6) ;   DFT : diminution préférentielle ou plus sévère de la fixation du cortex frontal et temporal antérieur, ou encore de la région mésiotemporale ; respect de la perfusion du cortex visuel, temporal latéral, sensorimoteur primaire.   DCLew : déficits plus étendus que ceux de la DTA, avec atteinte plus fréquente du cortex occipital et du cervelet. Si le manque de spécificité des anomalies tomoscintigraphiques est évident, il faut tempérer cette critique pour les motifs suivants (2,3,6) :   la confirmation précoce d’une démence est aisément obtenue ;   un suivi permet d’apprécier l’évolution des déficits scintigraphiques et cliniques ;   la confrontation avec les données de l’imagerie morphologique permet d’aboutir à un diagnostic étiologique précis dans la majorité des cas, surtout si l’on intègre les données cliniques.       Figure 4. Tomoscintigraphie cérébrale au 18F-FDG. A : aspect normal chez l’adulte ; B : forme précoce de maladie d’Alzheimer ; C : forme évoluée de la même maladie ; D : aspect normal chez l’enfant.     Figure 5. Tomoscintigraphie cérébrale au 18F-FDG. Aspect évocateur (mais non spécifique) d’une démence type Alzheimer. Déficit temporo-pariétal bilatéral marqué et symétrique. Fixation frontale normale.       Figure 6. Tomoscintigraphie cérébrale au 18F-FDG. Hypofixation étendue du cortex hémisphérique gauche, prédominant sur la région temporo-pariétale mais débordant sur la région frontale. Aspect compatible avec une démence vasculaire (mais non spécifique de ce diagnostic). Quelle sera la place de la TEP ? Quant aux performances respectives de la TEMP et de la TEP, il est tentant de penser qu’elles diffèrent compte tenu de leurs conditions techniques quelque peu divergentes des radiopharmaceutiques différents et des caractéristiques des systèmes de détection (caméras à positons versus caméras tomographiques dites conventionnelles) (7). La comparaison des deux approches scintigraphiques montre cependant une convergence globale de leurs résultats, encore que la sensibilité et l’exactitude diagnostiques de la TEMP soient moins élevées. En valeur absolue, l’exactitude de la TEMP serait de 15 à 20 % inférieure à celle de la TEP, un argument pour favoriser le développement de cette dernière et l’extension de ses indications à la neurologie (7).   En valeur absolue, l’exactitude de la TEMP serait de 15 à 20 % inférieure à celle de la TEP.   La combinaison de la TEP et de la clinique permet un gain de sensibilité de 25 % et de spécificité de 15 % dans des situations de probabilité clinique moyenne, le « gold standard » étant en l’occurrence l’examen neuropathologique. La TEP, ou à défaut la TEMP, trouve son indication idéale dans les démences progressives dont l’étiologie reste difficile à déterminer au terme d’un bilan clinique et paraclinique conventionnel (tomodensitométrie et/ou IRM). C’est là que le gain d’information est maximal, dans la mesure où il va infléchir la stratégie thérapeutique et la sensibilité élevée des techniques tomoscintigraphiques , ce qui est à l’évidence son atout majeur. Le prix à payer est une spécificité moins bonne (de l’ordre de 70 % en termes d’imagerie pure) qui peut être portée à 85-90 % (en moyenne) si le résultat scintigraphique est pondéré par la probabilité clinique du diagnostic (7).  Perspectives ouvertes par la visualisation des plaques amyloïdes • La possibilité de visualiser les plaques amyloïdes in vivo ouvre des perspectives diagnostiques et thérapeutiques nouvelles, mais l’heure est aussi aux questions. La fixation d’un radiopharmaceutique au sein du substratum anatomopathologique des DTA est a priori un bon moyen pour augmenter les performances diagnostiques des techniques précédentes. La volonté de marquer in vitro et in vivo les lésions anatomopathologiques caractéristiques de la maladie, qu’ils s’agissent des plaques amyloïdes ou des dépôts neurofibrillaires, existe depuis une dizaine d’années. • Les dérivés du rouge Congo et de la thioflavine sont les plus prometteurs. Deux radiotraceurs qui sont des ligands des plaques amyloïdes sont actuellement en développement4,5 : - le (18F)-DDNP ou 1-dicyano-2-[6-(diméthylamino)-2-naphtalényl]-propène (FDDNP) ; - le PIB ou N-méthyl-11C-2-(4’-méthylaminophényl)-6-hydroxy-benzothiasole (11C-PIB) encore appelé « Pittsburgh compound-B ». Des études de phase II ont abouti à des résultats préliminaires encourageants avec ces deux radiopharmaceutiques. La dernière, publiée dans le New England Journal of Medicine8 qui concerne le FDDNP démontre que la valeur du coefficient de liaison de ce dernier au sein du cortex fronto-pariéto-temporal et du cingulum postérieur permet de distinguer les sujets témoins des malades atteints d’une DTA ou d’un DCL, mieux que ne le fait la FDG-TEP. Le FDDNP a plus de chance d’être développé en clinique que le PIB, dans la mesure où le marquage est effectué au moyen du fluor 18, un radionucléide dont la période physique (2 h) est compatible avec une production industrielle et un usage routinier, mais il reste bien des étapes à franchir avant de parvenir à ce stade. • La mise au point de dérivés marqués par l’iode 123 ou le technétium 99m serait évidemment un plus, dans la mesure où leur utilisation en TEMP faciliterait considérablement la diffusion de la technique, du fait de l’omniprésence des gamma-caméras tomographiques conventionnelles. Quoiqu’il en soit, le développement de ces marqueurs de « l’amyloïdose » cérébrale ouvre des perspectives nouvelles et captivantes sur le plan pathogénique, diagnostique et peut-être thérapeutique, en permettant4,5 : - de valider la cascade amyloïde qui reste quelque peu spéculative, dans la mesure où d’autres lésions cérébrales peuvent contribuer à la pathogénie de la maladie et influer sur son évolution ; - de suivre l’évolution des plaques amyloïdes de manière non invasive et de rechercher des corrélations entre leur développement et l’évolution clinique ; - d’évaluer précocement la charge amyloïde cérébrale chez les sujets à risque de DTA, du fait d’aberrations chromosomiques ou d’un DCL ; - d’identifier les DCL à haut risque mieux que ne le font la FDG-TEP et la TEMP ; - d’évaluer les effets des médicaments aptes à freiner le développement des plaques amyloïdes ou à favoriser leur destruction, en sachant qu’il s’agira là d’un pas décisif dans l’approche pathogénique de la maladie, capable de lever les incertitudes actuelles. Le rôle de l’imagerie nucléaire dans le DCL Le même raisonnement s’applique au DCL, mais l’approche probabiliste est plus difficile à étayer, car le « gold standard » ne peut être ici que le suivi clinique à long terme et les études concluantes sont encore peu nombreuses. Dans cette indication, c’est l’imagerie multimodalités qui est actuellement la plus performante. L’identification d’un DCL à haut risque, qui représente en quelque sorte une transition entre le vieillissement cérébral dit « normal » et la DTA, va reposer a priori sur la mise en évidence :   d’une atrophie de l’hippocampe accessible à l’IRM ;   d’une diminution du métabolisme du glucose (TEP) ou de la perfusion (TEMP) dans les aires temporales ou temporo-pariétales ;   d’une aggravation des signes cliniques et tomoscintigraphiques sur le moyen ou le long terme, le but étant de poser à bon escient l’indication de la pharmacothérapie, ni trop tôt ni trop tard. Il faut reconnaître que l’exercice reste difficile face à la diversité et à l’hétérogénéité clinique du DCL  

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