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Alzheimer et Démences

Publié le 13 fév 2024Lecture 5 min

USPALZ 2023 | Actualités sur les traitements par anticorps monoclonaux dans la maladie d’Alzheimer

Odile MOLY, Toulouse

Résultats des essais cliniques, actualités du congrès CTAD (Clinical Trials on Alzheimer's Disease conference), recommandations actuelles américaines et françaises, où en sommes-nous aujourd’hui dans la prise en charge de la maladie d’Alzheimer ? Le Pr Mathieu Ceccaldi, neurologue à Marseille, le Dr Pierre-Jean Ousset, gériatre à Toulouse et le Dr Julien Delrieu, neurologue à Toulouse, ont fait le point sur les traitements par anticorps monoclonaux lors du congrès de l’USPALZ.

Les résultats du donanemab Le donanemab est un anticorps anti-amyloïde dont les résultats de deux essais cliniques publiés sont prometteurs. D’une part, l’étude TRAILBLAZER-ALZ de phase 2 qui a inclus 257 patients atteints de la maladie d’Alzheimer au stade léger ayant reçu du donanemab ou un placebo a montré sur des patients avec une charge en Tau de niveau intermédiaire, une réduction du score iADRS (integrated Alzheimer's Disease Rating Scale) par rapport à l’inclusion à 76 semaines plus faible sous donanemab (-6,86) versus placebo (-10,06). Le donanemab a donc permis un déclin cognitif et fonctionnel moins important chez ces patients. Concernant la tolérance, l'incidence des ARIA (amyloid-related imaging abnormalities) était significativement plus élevée dans le groupe donanemab versus placebo (39 % contre 8 %). D’autre part, l’étude TRAILBLAZER-ALZ 2 de phase 3 a inclus 1 736 patients présentant des symptômes précoces de la maladie d'Alzheimer et une pathologie amyloïde et Tau. « Les patients ont été sélectionnés et stratifiés en fonction de leur charge en Tau. N’ont été conservés que les patients avec une charge intermédiaire ou élevée en Tau », explique le Pr Mathieu Ceccaldi, neurologue à Marseille. Les patients ont été ainsi randomisés pour recevoir du donanemab ou un placebo. Les critères d’évaluation étaient les mêmes que ceux de l’essai de phase 2. La variation du score iADRS à 76 semaines a montré un ralentissement de la progression de la maladie de 35,1 % dans la population à Tau faible/moyen et de 22,3 % dans la population combinée. Le taux d’ARIA rapporté sous donanemab était de 37 % sous donanemab versus 15 % sous placebo. « Pour la majorité des ARIA survenus, il s’agissait d’ARIA-E asymptomatiques », conclut le Pr Ceccaldi.   Qu’avons-nous appris du CTAD 2023 ? Le CTAD (Clinical Trials on Alzheimer's Disease conference) est un congrès incontournable dans la maladie d’Alzheimer et a eu lieu en octobre 2023 à Boston. Lors de cet événement, les communications orales ont particulièrement porté le message de l’intérêt de traiter tôt les patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Les résultats du lecanemab, anticorps anti-amyloïde, sont en accord avec ce constat. Selon une sous-analyse de l’étude de phase 3 Clarity, une amélioration des patients avec une charge en Tau initiale faible a été rapportée avec le lecanemab. De plus, l’analyse du donanemab a montré qu’une diminution rapide des plaques amyloïdes réduisait la charge en Tau, même si l’amélioration clinique ne se manifestait que des mois après l’élimination des plaques amyloïdes. « Chez les patients qui ont diminué rapidement la charge amyloïde, on constate un impact important sur la charge en Tau à la fin de l’essai », précise le Dr Pierre-Jean Ousset, gériatre à Toulouse. Par ailleurs, le statut ApoE a été discuté et semble avoir peu d’impact sur l’efficacité clinique. En revanche, il pourrait abaisser le seuil à partir duquel l’amyloïde agit sur les lésions Tau. « Ce serait un argument pour traiter plus précocement les patients présentant l’allèle ApoE‐ε4 », explique-t-il. Enfin du côté des nouvelles formulations, la navette cérébrale ou « Brain shuttle » semble prometteuse. Utilisée dans le cadre de l’essai clinique sur le trontinemab, cette nouvelle formulation augmente la biodisponibilité du médicament. Si l’essai clinique est de faible ampleur avec 12 patients, l’efficacité du trontinemab semble être nettement supérieure aux autres anticorps anti-amyloïdes avec un taux d’ARIA de seulement 7 %, le plus bas observé jusqu’à présent. « Ainsi, faciliter le passage de la barrière hémato-encéphalique réduirait le risque d’ARIA », conclut le Dr Ousset.   Les recommandations françaises et américaines d’utilisation du lecanemab Les experts américains (Cummings J et al. J Prev Alz Dis 2023) recommandent pour une utilisation du lecanemab que le patient ait une maladie d’Alzheimer à un stade de sévérité MCI (Mild Cognitive Impairement) ou syndrome démentiel léger, avec la mise en évidence d’une signature amyloïde, un âge entre 50 et 90 ans et un score MMSE (Mini Mental State Examination) compris entre 22 et 30, « en France, on donne de la flexibilité en allant légèrement plus bas dans les formes non amnésiques et/ou sujet avec faible niveau socio-culturel et/ou sujet avec barrière de la langue avec un MMSE < 22, si on arrive à objectiver un trouble débutant par les échelles d’autonomie », précise le Dr Julien Delrieu, neurologue à Toulouse. Concernant la borne de l’âge, les experts français recommandent de ne pas exclure les patients uniquement sur l’âge mais de réaliser une évaluation gérontologique standardisée à visée exploratoire de la fragilité pour discuter au cas par cas de ces patients en réunion de concertation pluridisciplinaire. De plus, les experts américains recommandent d’exclure les patients du lecanemab selon les critères prévus au protocole : nécessité de déterminer le statut Apoe4 avant de traiter les patients, ne pas traiter les patients sous anticoagulants et avec des troubles de l’hémostase, contre-indication de la thrombolyse, « en France, on recommande de déterminer le statut ApoE‐ε4 en bilan pré-thérapeutique, car le statut ApoE‐ε4  multiplie par 3 le risque d’ARIA-E (œdème), par 2 le risque d’ARIA-H (hémorragique) et par 3 le risque d’ARIA-E symptomatique », indique le Dr Delrieu. Par ailleurs, la France recommande de ne pas traiter les sujets porteurs homozygotes E4/E4, car « les patients ApoE‐ε4 homozygotes multiplient par 6 le risque d’ARIA-E, par 3 le risque d’ARIA-H, par 6 le risque d’ARIA-E symptomatiques ». À la différence des antiagrégants, les anticoagulants augmentent le risque de macrohémorragie d’un facteur 5. Le traitement par lecanemab n’est donc pas recommandé par les experts français chez les patients sous anticoagulants. Enfin, en cas de survenue d’ARIA asymptomatiques au stade léger, il est conseillé de poursuivre le lecanemab avec une surveillance clinique et une IRM mensuelle jusqu’à stabilisation des ARIA-H et disparition des ARIA-E. En cas de survenue d’ARIA symptomatiques et sévères, il faut arrêter de façon définitive le lecanemab avec la nécessité d’hospitaliser le patient en soins intensifs et d’administrer des corticoïdes à forte dose pendant plusieurs jours avec un monitoring IRM en fonction du tableau clinique. « Ainsi il est nécessaire d’informer et de former au mieux les patients, les familles, les médecins généralistes, les spécialistes à l’arrivée de ces nouveaux traitements et du risque d’ARIA. Un parcours de soin spécifique pour la prise en charge des ARIA, notamment des formes sévères, doit être mis en place », conclut le Dr Delrieu. D’après les présentations du Pr Mathieu Ceccaldi, neurologue à Marseille, Dr Pierre-Jean Ousset, gériatre à Toulouse et Dr Julien Delrieu, neurologue à Toulouse, dans le cadre du congrès USPALZ (Congrès National des Unités de Soins, d'Évaluation et de Prise en Charge Alzheimer) décembre 2023.

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